Revue imprimée sur les presses du Yodok Club de Corbières.
Paraît tous les deux mois.

lundi 25 mars 2013

Sur Maria Obino


« C’est le souvenir d’une femme maigre et brune, une mère dont le fils était encore petit sur une plage de Sardaigne, il y a peut-être vingt ans. Plus récemment ce sont les appels téléphoniques lointains, que je ne comprenais pas vraiment : « J’ai été malade », et « Je t’envoie mes poèmes ». Et puis le paquet avec ces poèmes se perdit, entre Montpellier et Bologne. Finalement les poèmes arrivèrent, dix-huit mois plus tard, et le même jour j’appris que Maria Obino était morte.
            Toute son œuvre consiste en trois manuscrits dactylographiés. Le premier, composé entre 1981 et 1985, a pour titre l’inscription A.Z., que Maria avait choisi pour pseudonyme. Le deuxième, Lampi e acqua, écrit en 1985 (…) Le troisième, commencé en 1986, est resté inachevé. En outre, Maria traduisit deux poètes français dont elle se sentait proche, et j’ai encore à l’oreille l’intense traduction qu’elle avait faite d’un poème d’Anne-Marie Albiach.
Je n’ai aucune idée de l’insertion possible de ces textes dans l’orbe de la poésie contemporaine. Mais pourquoi chercher à les insérer où que ce soit ? Ils existent, voilà tout. Tellement rares sont les paroles écrites qui nous effraient, elles sont toujours tellement civiles et conciliantes ! Et l’effet bénéfique et sauvage de cet effroi, lorsqu’il s’approche avec son goût de maladie mortelle, est de nous faire apparaître, à côté, un aspect de la grande poésie comme une médecine dérisoire (du reste, quelqu’un a dit que les remèdes ne servent qu’aux individus en bonne santé, ou présupposés tels). »

Gianni Celati, préface à Lampi e acqua, Albert Meynier, 1989. (Traduction V.X.)
Cet ouvrage est à paraître aux éditions Harpo &.