« C’est le souvenir d’une femme maigre et brune, une
mère dont le fils était encore petit sur une plage de Sardaigne, il y a
peut-être vingt ans. Plus récemment ce sont les appels téléphoniques lointains,
que je ne comprenais pas vraiment : « J’ai été malade », et
« Je t’envoie mes poèmes ». Et puis le paquet avec ces poèmes se
perdit, entre Montpellier et Bologne. Finalement les poèmes arrivèrent,
dix-huit mois plus tard, et le même jour j’appris que Maria Obino était morte.
Toute son
œuvre consiste en trois manuscrits dactylographiés. Le premier, composé entre
1981 et 1985, a pour titre l’inscription A.Z., que Maria avait choisi pour
pseudonyme. Le deuxième, Lampi e acqua, écrit en 1985 (…) Le troisième,
commencé en 1986, est resté inachevé. En outre, Maria traduisit deux poètes
français dont elle se sentait proche, et j’ai encore à l’oreille l’intense
traduction qu’elle avait faite d’un poème d’Anne-Marie Albiach.
Je n’ai aucune idée de
l’insertion possible de ces textes dans l’orbe de la poésie contemporaine. Mais
pourquoi chercher à les insérer où que ce soit ? Ils existent, voilà tout.
Tellement rares sont les paroles écrites qui nous effraient, elles sont
toujours tellement civiles et conciliantes ! Et l’effet bénéfique et sauvage de cet effroi, lorsqu’il s’approche
avec son goût de maladie mortelle, est de nous faire apparaître, à côté, un
aspect de la grande poésie comme une médecine dérisoire (du reste, quelqu’un a
dit que les remèdes ne servent qu’aux individus en bonne santé, ou présupposés
tels). »
Gianni Celati, préface à Lampi
e acqua, Albert Meynier, 1989. (Traduction V.X.)
Cet ouvrage est à paraître aux éditions
Harpo &.